Arc International ou le « sauvetage » vu par Macron
Durant le grand débat télévisé
des présidentielles 2017, opposant Marine LE PEN à Emmanuel MACRON,
le candidat d'En Marche ! s'est enorgueilli d'avoir « sauvé
ARC INTERNATIONAL » pour répondre aux attaques de son
opposante. Il est donc intéressant d'observer plus en détails les
coulisses de ce « sauvetage » comme défini par
Emmanuel MACRON et d'identifier quels moyens ont été mis en œuvre
pour y parvenir. Et, enfin, tenter de répondre à la question
centrale, est-ce que ARC INTERNATIONAL a vraiment été sauvé comme
l'affirme MACRON ?
L'entreprise ARC INTERNATIONAL
s'appuie sur un effectif de 5.690 salariés au sein de la seule usine
de Arques, située dans le Pas-de-Calais. Elle a bâti son succès
grâce à la cristallerie et au savoir-faire des souffleurs de verre,
jusqu'à devenir le numéro un mondial dans le domaine des arts de la
table. Les différentes gammes de leurs produits s'adressent aussi
bien aux particuliers qu'aux professionnels comme dans l'hôtellerie
ou la restauration. Dès le début de l'année 2014, ARC
INTERNATIONAL a cherché à renflouer sa trésorerie en se séparant
d'une filiale spécialisée dans la fabrication de produits de la
marque Pyrex. Le fonds d'investissement américain AURORA CAPITAL
PARTNERS a ainsi pu profiter des faiblesses de management d'un
fleuron français pour faire l'acquisition de ARC INTERNATIONAL
COOKWARE, le 1er février 2014, pour un montant qui n'a pas été
dévoilé au public. Ensuite, tout au long de l'année 2014 des
négociations intenses ont été mené afin de trouver des
investisseurs en capacité de reprendre la gestion de ARC
INTERNATIONAL.
La première tentative pour sauver
ARC INTERNATIONAL a capoté en dépit de l'intérêt manifeste du
fonds d'investissement américain, HIG CAPITAL. Ce repreneur
potentiel s'était engagé à investir environ 70 millions d'euros.
Cependant, les créanciers avaient refusé d'alléger la dette de la
société ARC INTERNATIONAL, oscillant entre 280 et 400 millions
d'euros, ce qui avait rendu impossible la transaction. En
conséquence, HIG CAPITAL se retirait du dossier à la fin de l'année
2014.
La seconde tentative a été plus
concluante, se soldant par le rachat de ARC INTERNATIONAL. Ce rachat
n'aurait pu aboutir sans l'accord des créanciers qui ont finalement
accepté d'effacer une grande partie de la dette. L'américain PEAKED
HILL PARTNERS (PHP) a acquis ARC INTERNATIONAL pour un investissement
de 58 millions d'euros, la créance ayant été ramenée à 62
millions d'euros, soit une remise de 80%, un cadeau des banquiers
fort serviables à l'égard du Président Emmanuel MACRON.
C'est ainsi que les américains et
les relations de MACRON ont sauvé l'entreprise française ARC
INTERNATIONAL, tout en limitant la casse avec environ 350
suppressions de poste et en insufflant des millions d'euros. En
effet, avec l'accord du ministre de l'Economie Emmanuel MACRON, le
verrier a pu bénéficier d'un prêt de 48,5 millions d'euros
débloqué par le Fonds de développement économique et social
(FDES). Le FDES est un compte spécifique rattaché au Trésor public
via le ministère des Finances et dont le rôle est d'octroyer des
prêts afin de promouvoir le développement économique et social des
entreprises françaises dans une aire géographique donnée.
Le 16 mars 2015, le tribunal de
commerce de Boulogne-sur-mer validait la proposition de rachat de
PHP, avec un investissement de 58 millions d'euros, équivalent à
80% du capital de ARC INTERNATIONAL. En conséquence, l'entreprise
française est devenue la propriété des américains, voici donc
comment se définit un sauvetage selon Emmanuel MACRON.
Mais l'histoire ne s'arrêtait pas
sur cet hypothétique sauvetage puisque le 19 mai 2017, l'actuel
ministre de l'Economie, Bruno LE MAIRE, s'était rendu au siège de
ARC INTERNATIONAL pour faire face à un nouveau problème de
trésorerie. La société était encore entrain de s'asphyxier, il
existait même un risque réel pour que les salaires du mois de juin
2017 ne puissent être virés. Si tel avait été le cas, il est fort
probable que les salariés se seraient réunis pour organiser un
mouvement de grèves qui auraient fait un sacré tapage médiatique
avec plu de 5.000 salariés en colère.
Cependant, Bruno LE MAIRE apportait
des bonnes nouvelles puisque trois investisseurs ont décidé de
soutenir encore ARC INTERNATIONAL en injectant la somme de 35
millions d'euros pour éteindre rapidement ce feu de broussailles et
ainsi remédier à sa propagation dans les médias. Cette affaire
aurait pu considérablement affaiblir le parti d'Emmanuel MACRON
alors en pleine campagne pour les élections législatives. Rappelons
que l'ancien ministre de l'Economie avait affirmé devant des
millions de téléspectateurs avoir sauvé ARC INTERNATIONAL. Le
jaillissement médiatique d'une telle bévue auraient pu porter un
fort préjudice dans les urnes pour les candidats représentants le
parti En Marche ! Mais avec quelques millions d'euros,
l'oligarchie a protégé MACRON en évitant qu'il ne soit pris pour
cible par les médias. Cet argent frais provenait de trois sources,
celle de l'investisseur initial, l'américain PHP, avec 10 millions
d'euros, et celles des gouvernements français et russes pour les 25
millions restants.
Dans les tuyaux, le bruit court
dorénavant qu'il serait question de vendre la très rentable filiale
américaine du groupe pour stabiliser à plus long terme la
trésorerie. A une certaine époque, peu après avoir « sauvé »
l'entreprise, Emmanuel MACRON psalmodiait qu'il y avait « un
avenir pour ARC INTERNATIONAL ». Pour le moment ce futur
est assuré par une partie de l'argent public français maintenant
ARC INTERNATIONAL sous perfusion financière mais pendant encore
combien de temps ?
Nul ne cherche à savoir comment
des entreprises peuvent-elles vivre sur leur endettement et ni
pourquoi certaines d'entre elles vont bénéficier de l'argent public
plus que leur homologue ? Nul ne cherche à expliquer les
raisons qui peuvent pousser des banques à faire des aménagements
aboutissant à l'annulation des créances d'un client. La France
s'est montré à plusieurs reprises incapable de sauver nos
entreprises alors nous avons fait appel aux bienveillants
investisseurs étrangers, très souvent américains, comme nous avons
pu le voir avec ALSTOM ou encore TECHNIP. Est-cela sauver une
entreprise française ou est-ce cela faire preuve d'impuissance ?
Enfin, quel coût réel peut engendrer un service tel que la
suppression d'une dette à la demande d'un ministre de l'Economie et
futur Président de la République ?
Pourquoi cette entreprise
prétendument sauvée est-elle encore au bord de la faillite après
avoir signé fin 2015 un contrat avec IKEA ? Le géant suédois
a même participé au financement de la remise à niveau d'un four et
d'une ligne de production afin que ARC INTERNATIONAL puisse honorer
cette commande de plusieurs millions de pièces. Un investissement de
12 millions d'euros financé à moitié par IKEA. Malgré tous ces
soutiens financiers, l'entreprise ne semble toujours pas en bonne
santé financière alors qu'un résultat net d'environ 80 millions
d'euros devrait permettre de rembourser leurs créances. Visiblement
pas chez ARC INTERNATIONAL alors où va l'argent ? Où sont
passés les 58,5 millions généreusement offert par le Gouvernement
français depuis 2015 ? Le « Mozart de la finance »
a certainement des réponses à nous fournir en tant que sauveteur
officiel d'ARC INTERNATIONAL.
Libération :
« Arc International, du cash et la nouvelle tête de Bercy
en visite », Stéphanie MAURICE, 19 mai 2017.
Le
Monde : « Le verrier Arc International évite la crise
et retrouve un peu d’air », Philippe JACQUE, 19 mai 2017.
Les
Echos : « Arc International se donne une bouffée
d'oxygène », Olivier DUCUING, 19 mai 2017.
La
Croix : « Arc International, un dossier brûlant »,
Jean-Claude BOURBON, 15 mai 2017.
Débat
présidentiel 2017 : MACRON déclare avoir sauvé Arc
International, affichage temps de parole MACRON = 10 minutes 41
secondes, 3 mai 2017.
Challenges :
« Industrie : ce que cache la crise d'Arc
International, trois ans après son sauvetage », Thiébault
DROMARD, 16 avril 2017.
BfmBusiness :
« L'État met 70 millions d'euros sur la table pour sauver
William Saurin », 16
décembre 2016.
Challenges :
« Arc International retrouve un second souffle »,
Thiébault DROMARD, 11 octobre 2015
Le
Monde : « Le tribunal de commerce valide la reprise
d'Arc International », 16 mars 2015.
Legifrance :
« Arrêté du 12 mars 2015 relatif au versement d'un prêt
du Fonds de développement économique et social à Arc International
SA ».
La
Croix : « Les recettes américaines pour redresser Arc
International », Jean-Claude BOURBON, 11 février 2015.
Le
Monde : « Un accord sur la dette ouvre la voie à la
reprise d’Arc International », Laurie MONIEZ, 9 février
2015.
Challenges :
« Le verrier français Arc International passe sous pavillon
américain », Thiébault DROMARD, 1er septembre 2014.
La
Voix du Nord : « Arc International vend sa filiale
Pyrex », 31 janvier 2014.
Le
Figaro : « Pyrex vendue en janvier au fonds Aurora »,
10 décembre 2013.
Challenges :
« Arc International (arts de la table) pourrait bientôt
céder Pyrex », 28 novembre 2013.
Challenges :
« France-La reprise d'ARC INTERNATIONAL se précise »,
24 décembre 2014.
BONUS :
CLIMPACT-METNEXT
CLIMPACT-METNEXT est le résultat
d'une fusion française ayant donné naissance à un leader européen
dans un secteur innovant, celui de la fourniture de services d'aide à
la décision intégrant la météo. Selon l'expertise de
CLIMPACT-METNEXT : « 70% de l'activité économique est
météo-sensible ». L'intelligence climatique a pour rôle
d'analyser la sensibilité de l'activité économique en fonction des
aléas climatiques. Le froid ou le chaud vont entrainer un
comportement différent chez le consommateur, une envie de glace ou
une envie d'un chocolat chaud. La consommation d'énergie en
entreprise peut aussi avoir des interdépendances avec le climat,
c'est ce que se propose d'étudier cette entreprise aussi bien dans
le secteur de la grande consommation que de l'énergie, du tourisme
ou des transports. L'Etat était actionnaire majoritaire du groupe
METNEXT et la fusion avec son concurrent direct CLIMPACT remonte au
mois de janvier 2013.
Le japonais WEATHERNEWS Inc. a pu
faire l'acquisition de METNEXT sans que cela ne pose aucune
difficulté aux actionnaires dont l'Etat français. Après tout,
quelle importance, cela n'est que de l'argent public. Le 26 janvier
2017, le processus de fusion-acquisition était entièrement finalisé
et le Gouvernement français laissait filer entre les mains des
japonais une entreprise française innovante dans un secteur encore
balbutiant. Mais nos politiques préfèrent s'attarder à blâmer le
code du travail ou le manque de formation professionnelle alors que
des fleurons français créée par des cerveaux français sont bradés
à l'étranger.
Libération :
« Climpact-Metnext fait la pluie et le beau temps sur
l’économie », Coralie SCHAUB, 20 janvier 2014.
Les
Echos : « Climpact-Metnext fait la météo des
affaires », Chantal HOUZELLE, 5 décembre 2012.
BpiFrance :
Communiqué de presse du 26 janvier 2017.
Frank
D.
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