Protection de l'enfance : loi interdisant la fessée


Vous trouverez dans ce blog deux autres articles pour approfondir la question ou pour tout parent en instance de divorce/séparation et désireux de s'informer sur la procédure :





Le système de protection de l'enfance a été décentralisé dans les années 1980, déchargeant l’État de cette mission pour la déléguer au Conseil Départemental. Dorénavant le rôle de l'ex DDASS est dévolu à la Protection Maternelle Infantile (PMI) et à l'Aide Sociale à l'Enfance (ASE). Ces deux institutions ont pour mission de protéger nos enfants par la prévention en leur proposant un accompagnement personnalisé, et en apportant un soutien à la famille voire dénoncer les cas les plus problématiques au Juge des Enfants (JdE). La loi française a édicté deux voies possibles pour encadrer l'enfance, la première par le biais de la procédure administrative et la seconde par le biais judiciaire selon le niveau de coopération de la famille.





A ce propos, tout citoyen ayant été le témoin d'une situation de maltraitance impliquant un mineur peut et doit la signaler en composant le numéro 119 par téléphone. A la demande de l'interlocuteur le signalement peut-être effectué sous l'anonymat. Ces informations sont récoltées par la Cellule de Recueil des Informations Préoccupantes (CRIP) qui adresse un signalement en fonction de ses prérogatives au département concerné et au procureur de la République puis, le cas échéant, au JdE.





Le problème majeur de la décentralisation d'un système visant à protéger l'individu est la dilution de l'information et le manque voire l'absence de liaison entre les services nouvellement créés. La nécessité de l'installation d'un réseau informatique centralisant toutes les données relatives aux enfants, suivis par la PMI ou l'ASE à l'échelle nationale, est une condition sine qua non pour une optimisation de leur prise en charge personnalisée. Ce fut en partie les objectifs inscrits dans la loi sur la réforme de la protection de l'enfance en 2007.1



Appel téléphonique au 119 >


CRIP >


Conseil Départemental (PMI / ASE) >


Procureur de la République >


JDE



Le JdE a plusieurs outils à sa disposition pour évaluer la situation personnelle d'un mineur. Il peut s'entretenir avec l'enfant, diligenter une AEMO2 voire une expertise médico-psychologique, ou encore se fier à sa propre expérience. Mais est-ce suffisant ? De nombreux faits divers ont rappelé que seul, le danger avéré ne suffit pas, il faut avoir atteint un certain degré de maltraitance comme la mort pour certaine famille pour que le système de protection de l'enfance puisse saisir l'ampleur du danger. Le cas d'Inaya nous a démontré que la mort par maltraitance de cet enfant avait permis de sauver la vie de son grand-frère et de sa petite-soeur au mépris de la sienne. La complaisance des magistrats et des travailleurs sociaux à l'égard de parents ne présentant aucune caractéristique viable pour s'occuper d'un enfant reste une énigme. Pour Inaya, la maltraitance était avérée et pourtant la fin de l'histoire nous la connaissons, un enfant est mort dans des conditions inhumaines avec l'assentiment du système de protection de l'enfance.



Pourtant la maltraitance physique reste le danger le plus visible et le plus facile à identifier, quid de la maltraitance psychologique qui est bien plus pernicieuse à repérer mais tout aussi dommageable pour le développement d'un enfant. Alors comment faire ? Les expertises psychologiques peuvent aussi parfois relever d'une supercherie intellectuelle voire dans certain cas de fausses expertises visant à se conformer au cahier des charges de la procédure administrative ou judiciaire, sans se soucier du réel devenir de l'enfant. Après tout, ne s'agit-il pas des enfants des autres ?

Faits divers

Régine Labeur, sans diplôme, a pu établir 400 expertises judiciaires3 relatives à des affaires familiales. Ce juteux business lui a rapporté la somme de 70.000 euros en trois ans près du tribunal de Bordeaux, avant d'être arrêtée dans cette folie qui a certainement détruit bon nombre de vies à Périgueux. Les magistrats n'auraient absolument rien vu pendant cinq ans, c'est dire l'attention et le sérieux accordés à l'intérêt de l'enfant. C'est l'arrestation de son mari pour violences conjugales qui mettra un terme à cette mascarade. L'époux avoua alors que sa femme avait de « faux diplômes ». Régine Labeur fut condamnée à deux ans de prison ferme. Que dire concernant les victimes de Régine Labeur ? Est-ce que les 400 expertises ont été annulées pour être à nouveau diligentées afin que les familles soient évaluées par une personne au minimum honnête ?



Les rapports d'une fausse psychologue ont-ils vraiment réussi à bluffer les magistrats ? Ou sommes-nous en présence d'une machine judiciaire qui a certaines prérogatives à suivre, mais méconnues de la plupart des citoyens ? Il est légitime de se questionner face à un tel folklore administratif ayant pour seul objectif de servir de caution à la décision du JdE concernant le devenir d'un enfant. L'une de ses prérogatives, c'est indéniable puisqu'elle figure dans la loi,4 est le maintien de l'enfant dans son lieu de vie d'origine. Partant d'un tel postulat, il est logique de voir que le parent restant au domicile conjugal puisse majoritairement bénéficier de la garde de son enfant. Et que pour l'en déloger il faut de solides arguments pour éveiller la conscience du JdE à l'intérêt de l'enfant. Dixit l'affaire d'Inaya et d'autres moins dramatiques mais tout aussi injustes pour les enfants maltraités, tous maintenus dans leur lieu de vie d'origine sous ce fallacieux prétexte. La sécurité d'un enfant prévaut sur ses repères spatio-temporels car la peur ou la souffrance ne sont pas des sentiments permettant à l'enfant de s'épanouir sereinement dans un environnement stable.




Situation critique ?

Le suicide de Fabrice Hrycak5 est un énième cri d'alerte lancé au secteur médico-social et particulièrement aux services en relation avec la protection de l'enfance. En 2011, cet éducateur âgé de 38 ans a mis fin à ses jours en dénonçant des malversations financières au sein d'une structure de protection de l'enfance. La veille il avait déclaré : « je vais faire exploser l'association ». Une histoire parmi tant d'autres rappelant que l'Homme mauvais ne se préoccupe guère de savoir où il commet ses forfaits et qui en sont les victimes, l'essentiel pour lui étant de satisfaire ses aspirations. Tout cela est d'autant plus cynique et inepte puisque cela se déroule au sein du domaine médico-social où l'humain est au centre de tout. Le suicide de Fabrique Hrycak est l'expression du désarroi et d'un ras-le-bol ultra-violent envers un système et une catégorie d'Homme qui n'ont de cesse de vouloir profiter d'autrui tout en feignant de s'en préoccuper.



En 2009 le budget dédié à l'enfance s'élevait à 8 milliards d'euros, cette somme ne sert-elle qu'à enrichir des cadres malhonnêtes ou des familles d'accueil vénales ou encore à investir dans l'immobilier ? Et que faisons-nous de la formation des éducateurs pour assurer le fonctionnement des PMI et de l'ASE, de celle des enquêteurs sociaux qui ne possèdent d'ailleurs aucun statut ainsi que des moyens d'actions limitées et peu intrusifs pour être en capacité d'évaluer pertinemment la situation d'une famille ? Il faut investir dans cette formation car l'enfance est la jeunesse et donc notre avenir, mépriser cette réalité signifie nous mépriser nous-mêmes.



Enfin il serait légitime que les juges en charge de ces dossiers puissent bénéficier d'un temps suffisant pour prendre connaissance de l'ensemble des pièces transmises par les parties. Mais l'énormité de cette tâche semble impossible face à l'accumulation des dossiers.



Les établissements liés aux services de protection de l'enfance ne subissent quasiment aucun contrôle sur leur fonctionnement interne. La protection de l'enfance est un système opaque. Un contrôle tous les 26 ans, c'est le constat d'une enquête menée pendant deux ans par Alexandra Riguet et Bernard Laine, auteurs de « Les enfants en souffrance... la honte » publié en 2014. Oui, 26 ans, c'est le rythme actuel qu'il faut pour assurer la surveillance complète de l'ensemble du système de protection de l'enfance. En pratique ces organes de contrôle n'interviennent qu'en cas d'alerte autant dire qu'il s'agit d'un service de désenfumage plutôt qu'un service de prévention et de surveillance. C'est pourquoi les dérives dans le secteur médico-social sont facilement étouffées face au dysfonctionnement du système visant à les contrôler. Or cette situation est intolérable, le secteur du médico-social, plus encore la protection de l'enfance, consiste à gérer des personnes vulnérables ou en situation de vulnérabilité, il faut donc renforcer ou faire appliquer les lois existantes afin de protéger cette population sensible. Comment peut-on galvauder une mission aussi importante ? C'est inacceptable dans une société qui se prétend évoluée.



L’État français ne peut-il pas diffuser une campagne médiatique massive et récurrente de prévention sur la thématique de la maltraitance infantile ? Il suffit pour cela de supprimer quelques publicités pour laisser la place aux sujets qui préoccupent vraiment l'humain. Cependant les dépenses du budget liées au secteur de la protection de l'enfance démontrent cette absence de volonté puisque la prévention ne représente que 4% de l'enveloppe totale.6 Un chiffre modique qui brise l'idée reçue selon laquelle la prévention serait le rôle principal du système de protection de l'enfance.



En cette fin d'année 2018, les politiciens français discutent d'un projet de loi pour proscrire symboliquement les « violences ordinaires » telles que la fessée ou la gifle. Une démarche intrusive vis-à-vis du rôle des parents mais incontestablement bénéfique pour l'enfant.7 Notons que cette loi à vocation pédagogique ne prévoit pas de sanctionner les parents contrairement aux violences conjugales.



La violence n'est pas une réponse constructive et pertinente à employer face à une situation, à contrario elle générera d'autres problèmes. C'est pourquoi la violence n'est pas à considérer comme un usage diplomatique ou éducatif mais comme une contrainte physique et/ou psychologique. La violence est une forme d'aliénation qui soumet l'objet à son bourreau au lieu de le pousser vers l'autonomie et l'indépendance. Historiquement la violence fut la soumission de l'individu face à la terreur, ça n'est en aucun cas une forme d'amour parental ou un outil éducatif. Un parent violent est un parent qui a abandonné ses responsabilités. Avec cette loi adoptée par l'Assemblée Nationale dans la nuit du 29 novembre 2018, la France est devenue le 55ème pays dans le monde à légiférer sur les « violences ordinaires » appliquées à l'enfant.8



Nous sommes au 21ème siècle et le pouvoir central doit toujours intervenir pour préserver l'être humain de ses bas instincts. Peut-être faudrait-il créer une école pour apprendre aux potentiels parents leur futur métier d'éducateur ? Puis pourquoi pas instaurer un permis d'éduquer à points pour sanctionner les mauvais parents et les contraindre à respecter leur contrat parental. Les gens ne semblent prendre conscience de l'importance d'une problématique que si l'autorité légifère et sanctionne. L'idée semble judicieuse car rompre le cercle de la violence générée par la source originelle, celle du parent créateur, ne peut qu'être favorable aux générations futures.



Globalement la situation de l'enfant reste très préoccupante au niveau mondial or cela est un indicateur de notre propre relation envers la vie. Tout le monde n'est pas en capacité matérielle ou spirituelle d'élever un enfant, c'est un métier, ça s'apprend quotidiennement. Cela n'a rien de physiologique ou d'instinctif, il faut savoir s'adapter constamment aux évolutions d'un monde en perpétuel mouvement même si la base éducative reste identique. Toute personne a besoin d'amour, de sécurité, d'un toit, de soin, de nourriture et d'un accès à l'apprentissage. C'est le minimum à considérer pour vivre dignement et l'être humain est encore loin d'avoir atteint ce niveau d'évolution qui lui conférerait l'autorité de pouvoir jaser autour du concept d'humanisme.





Frank D.

1Loi du 5 mars 2007.

2AEMO = Aide Éducative en Milieu Ouvert.

3La Dépêche du Midi : La fausse psy avait signé 400 expertises, 15 juin 2012.


5L'OBS : "Enfants en souffrance… La honte", une enquête choc, Marie Vaton, 28 septembre 2014.

6Cour des Comptes : Rapport thématique sur la protection de l'enfance, page 6, 2009.


8Le Monde : La fessée interdite dans 54 pays… et bientôt en France ?, Anne-Aël Durand, 16 novembre 2018.

La liste des 54 nations : Suède, Finlande, Norvège, Autriche, Chypre, Danemark, Lettonie, Croatie, Bulgarie, Allemagne, Israël, Turkménistan, Islande, Ukraine, Bulgarie, Hongrie, Grèce, Pays-Bas, Nouvelle-Zélande, Portugal, Uruguay, Venezuela, Togo, Espagne, Costa-Rica, Moldavie, Luxembourg, Liechtenstein, Tunisie, Pologne, Kenya, Albanie, République du Congo, Soudan du Sud, Honduras, Macédoine, Malte, Brésil, Bolivie, Cap-Vert, Argentine, Saint-Martin, Estonie, Nicaragua, Andorre, Bénin, Irlande, Pérou, Mongolie, Paraguay, Slovénie. Monténégro, Lituanie et Népal.

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